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Bandit Queen

from Bandit Queen by ANC-H5N1

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about

This track is about life and death of Phoolan Devi (1963-2001) also known as the India's Bandit Queen.

lyrics

Moi, Phoolan Devi, reine des bandits (extraits)


Je suis née dans la violence. Je mourrais dans la violence. Voilà mon destin.

Aujourd’hui, c’est mon tour de parler. Moi seule sais les tortures que j’ai subies. Moi seule connais le soulagement de la revanche.

C’est parce que j’étais une femme que j’ai été humiliée au plus profond de mon âme. Je n’ai jamais admis cette condition. Je me suis révoltée.

Je suis née moins qu’un chien, mais je suis devenue une reine.

Etre une fille. Une fille n’existe pas sans son père, son frère, son oncle ou son mari, n’importe quel homme de sa famille ; quelles que soient sa caste ou la richesse des siens. Elle ne peut pas marcher seule dans la rue et, si elle n’est pas mariée, elle est impure, maudite. Au service de qui veut...

Un jour je serai grande, j’aurai plus de force pour travailler.

Récolter le fumier, le porter au champ, nourrir les bêtes, ramasser l’argile pour réparer le mur que la mousson a emporté, aller chercher l’eau, broyer le fourrage, moudre le grain, faire cuire les chapatis, nettoyer l’étable, attendre que tout le monde ait mangé et aller me coucher. Voilà mon destin.

Ce Putti Lal a 35 ans, trois fois mon âge. C’est vieux. Et il est déjà veuf. Il est plus riche que nous. C’est tout ce que je sais de lui.

Mes parents ont dû emprunter pour payer la dot. 500 roupies.

Mon père sanglote, la tête entre les mains.

Il sait que je ne devrais pas partir, que la loi l’interdit. Que cet homme doit attendre que je sois femme. Qu’à mon âge, à peu près 11 ans, peut-être plus, peut-être moins, c’est comme s’il achetait une esclave. A cette différence que c’est lui qu’on a payé pour me prendre...

Putti Lal est laid, il sent la sueur et fait un drôle de bruit avec sa bouche, quand il me voit. Il n’est pas content de moi. Il va peut-être me renvoyer à la maison ? Je voudrais rentrer chez moi. Je voudrais que mes parents m’expliquent pourquoi ils m’ont laissé emmener ici. Pourquoi cet homme dit tout le temps: « Tu dois obéir, je suis ton mari ! »

Il n’avait pas le droit de me toucher avant, mais il l’a fait. Je jure qu’un jour, il paiera ma souffrance. Je ne passerai pas ma vie à plat ventre devant cet homme. Je ne passerai pas ma vie cachée, morte de peur derrière le foin. Un jour, c’est eux qui le disent, je deviendrai grande. Alors je me vengerai.

Ces fils de riches font exactement ce qu’ils veulent. Nous savons que d’autres femmes, mariées ou non, ont été violentées par un, deux, ou dix hommes à la fois. Et il ne s’est rien passé pour eux, personne ne les a punis. C’est toujours la fille ou la femme qui porte la honte et se retrouve punie.

Ne rien dire. Ne pas faire de scandale.

Je ne peux pas ! J’étouffe de rage et d’humiliation. Le seul recours, dans notre société, est de se taire.

Je veux me venger de ces sales types. Qu’ils endurent la même honte et qu’on les tue ensuite. Je n’aurai pas de repos sans cela.

Les riches n’attendaient qu’une chose de nous : que nous soyons leurs esclaves bien obéissants. Ils ont provoqué ma révolte, et maintenant à cause de cela ils ont fait de moi et de ma famille des parias, sans blé, sans travail, ni eau...

Deux hommes avancent. L’un des deux me gifle brutalement. Un homme me prend par la main et m’entraîne. Un autre me soulève, mes pieds ne touchent plus le sol. Ils tirent des coups de fusil en l’air, les villageois s’éparpillent.

Toute la nuit, pendant cette course folle sous la pluie, j’ai cru me trouver entre les mains de policiers, mais je suis sûre maintenant que ce sont bien des bandits. Visages sombres, regards sauvages, des bandeaux serrés sur le front.

J’assiste à un pillage pour la première fois de ma vie. C’est terrifiant. Ils sortent des coffres, des boîtes, de l’or et des roupies. Ils cognent sur les femmes, crient, il y a un bruit épouvantable, et personne ne se défend. Je n’entends que des pleurs et des hurlements. Je ne vois que des ombres qui fuient devant les bandits.

La bande de Vikram est constituée essentiellement de mallahs. Ils ne courent pas les villages à la recherche des femmes, comme les hommes de Babu Gujar. Ils se sont associés avec eux pour un temps, et le hasard a voulu que je tombe entre leurs mains à ce moment-là. Ils se déplacent la nuit, se cachent le jour, s’arrêtent dans des villages pour faire des provisions, tout semble facile pour eux. Il y a les villages qui les nourrissent et où ils distribuent de l’argent, et ceux qu’ils pillent et où ils violent les femmes...

Il passe une guirlande de fleurs de souci autour de mon cou, puis une autre autour du sien, et de la poudre vermillon sur mon front. C’est la marque des épouses. Je suis mariée. Phoolan Devi vient d ‘épouser un bandit sur les bords de la Yamuna, au milieu d’autres bandits.

La rage m’envahit, le sang afflue à mon visage, comme un feu intérieur. Ce chien n’a pas encore compris ce qui allait lui arriver. La bande toute entière se déchaîne, ils le traînent au-dehors, et à coups de bâton, lui font sauter les dents, craquer les os. Ils ont ficelé ses mains et ses pieds. La salope se souvient alors de ce que Putti Lal lui a fait.

Pour la première fois battre quelqu’un comme il m’a battue. Je deviens soudain folle de vengeance.

Il est couvert de sang et supplie qu’on le libère. Mais la rage, le feu qui m’a enflammée, a du mal à s’éteindre.

Soudain un coup de feu éclate, puis un autre, et Vikram tombe aussitôt. Persuadée que Vikram est mort, je me moque de vivre ou de mourir. Mais soudain j’entends sa voix. Il se remet debout, son fusil à la main. Nous sommes dix, la bande de Shri Ram onze. La tension est terrible entre les deux bandes. Ils disparaissent lentement. Ils fuient comme des rats.

Pour prouver qu’il est bien vivant, Vikram a fait faire un cachet qui lui permet de signer les pillages de son nom. Il y a fait inscrire en grosses lettres: PHOOLAN DEVI ET VIKRAM SONT DE RETOUR PARMI LES VIVANTS.

Notre dernière nuit, la seule fois où nous n’avons pas respecté la règle de sécurité et où nous avons dormi comme mari et femme.

J’ai entendu tirer ! D’abord une grosse détonation, puis d’autres. Mes oreilles sifflent du bruit assourdissant, et ma tête tourne, comme si j’étais droguée, empoisonnée. Vikram est toujours allongé près de moi. Sa voix est faible, je l’entends comme dans un brouillard, je ne comprends rien à ce qui se passe. du chloroforme. J’en ai plein la bouche, le nez, les yeux.

Shri Ram me prend par les cheveux, un autre par les bras, un autre par les jambes. Alors les hommes me ligotent. Pieds et poings liés. Nue. Ils me jettent dans les grands buissons de babool, s’acharnent sur moi à coups de crosse, me piétinent la poitrine et le ventre.
Vikram est mort. Ils vont me torturer.

On me jette à terre, et ils commencent à me violenter. Shri Ram le premier. Puis d’autres. Il les encourage. Leur dit de se servir de moi, de bien en profiter. Je les supplie de me tuer.

Shri Ram semble avoir mis le feu au village. En fait, j’apprendrai plus tard qu’il a non seulement tué les prisonniers de notre bande, mais qu’il a brûlé vif le malheureux brahmane.

La survie ne s’apprend pas. Chacun doit suivre sa destinée. La mienne est de survivre. Une seule force : la vengeance. Ce que m’a fait subir ce chien, je ne pourrai jamais l’oublier. Je voudrais l’attraper, mais pas le tuer, ce serait trop doux pour lui.

Quand j’ai fait mon choix, Baba Mustakim déclare devant tous les hommes réunis : « Debout tout le monde! Vous allez jurer de ne jamais poser les yeux sur Phoolan Devi comme sur une femme. Vous jurerez devant Allah de la considérer comme un homme, comme votre propre frère ! Si l’un de vous ne respecte pas cette promesse, je le tuerai moi-même! Longue vie à Phoolan Devi ! » Puis il noue lui-même autour de mon front le bandeau rouge, signe de la colère de Durga. Avant de quitter le camp, Baba m’offre un cadeau, un cachet comme celui qu’avait fait faire Vikram pour que chacun sache qu’il était encore en vie. Dessus, il y a marqué: PHOOLAN DEVI, LA REINE DES BANDITS.

Les boutiques éclatent sous les coups de crosse, les marchands se sauvent devant les fusils en abandonnant tous leurs bijoux, les colliers, l’or, les perles et l’argent... Tous les pauvres gens se précipitent aux cris de Baba Mustakim et de Phoolan Devi.

Mais la police nous attend derrière la voie ferrée. Tout d’un coup, c’est un enfer de coups de feu. Ils ont même des grenades.

J’ai prouvé que je pouvais diriger une bande comme un homme et mener la bataille sans recevoir une blessure.

J’ai aidé les pauvres et leur ai distribué de l’argent, j’ai aussi torturé des monstres. Parce que la police n’écoute pas les pauvres gens. Parce que des centaines de gamines avortent des dizaines de fois pour échapper à la honte. Certaines se suicident par le feu, d’autres se jettent dans la rivière ou au fond d’un puits. Parce qu’on les traite comme des prostituées. Et qu’elles ont peur.

Ils ont pris ma mère, mon père, et les ont mis en prison durant plusieurs semaines pour m’inciter à me rendre.

Man Singh parle souvent de négocier notre reddition, pas moi. Au contraire, je fais parvenir des messages à la police pour les avertir que je vais lui empoisonner la vie et semer la terreur partout où je passerai.

Je dois abandonner la jungle et la liberté pour que ma famille vive en paix, mais je ne suis pas obligée de mourir. J’ai donné mes conditions: ne pas être pendue, faire huit ans de prison,

Six jours. Cinq nuits. Regarder le soleil se lever et se coucher. Six jours d’angoisse et de liberté frénétique. Je ne me rends pas complètement compte de ce que veut dire cette chose: se rendre. Capituler. Je vais leur remettre mon fusil, ma cartouchière. Me retrouver les mains nues.

Devant moi, la foule qui attend, des milliers de gens. Le soleil est haut, le ciel clair.

J’avance sur le podium, vers un homme qui porte l’uniforme d’un soldat. Alors je lui tends mon fusil, il le prend. Je retire ma cartouchière et je l’accroche à son bras. Je lève mes mains et les joins à la hauteur de mon front, comme si je m’apprêtais à prier, pour saluer la foule devant moi, grondante et immobile.

Je suis entrée à la prison de Gwalior en février 1983. Je devais en sortir en 1990. Ils avaient promis de respecter les clauses de ma reddition. Ils avaient promis de me juger. Ils ne l’ont jamais fait.

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credits

from Bandit Queen, released December 12, 2012

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